Maurice nous a quitté, il est parti pour son dernier voyage, en mer très certainement, puisque c'est là qu'il a passé sa vie.
Il y a quelques semaines, JoJo l'avait monté en voiture au chantier pour voir la résurrection de sa chaloupe, la Julien-Germaine.
"Elle est comme neuve" qu'il disait l'air ravi. A l’association, nous avons tous été très affectés d'apprendre sa disparition.
Pompon, comme l'appelaient affectueusement les Portais, était le lien humain entre ces bouts de bois, leur histoire et notre travail.
Au delà, et plus personnellement, Maurice c'est la 1ère personne avec Claude Perret qui, à l'épi, m'a dit bonjour quand je suis arrivé à Port en Bessin.
Maurice était curieux de voir ces hommes grenouilles venus explorer les épaves. Étonné aussi, certainement, de me voir devenu matelot, puis très vite patron.
Deux fois par jour il faisait son tour de quai, sans oublier de passer "au trou" récupérer 2 bouts de bois et une bricole.
Au passage il s'arrêtait devant mon bateau. Il avait toujours une parole gentille, voir un compliment. Me voyant entretenir moi-même mon Sauvage, il me disait toujours "C'est le 1er argent gagné".
Je crois qu'il m'aimait bien. Cela me rassurait, me donnait une place dans la communauté. Il était de ceux que j'appelle "mes maitres à penser". Il ne voyait pas d'un mauvais oeil, ce horsin, ce "pied de boeuf", "même pas de Port", devenu pêcheur et qui réussissait.
Mais mon plus grand plaisir était de lui offrir un poisson. "ça ne se refuse pas" disait-il en sortant de la poche intérieure de sa veste un sac plastique bien plié et mieux repassé qu'un mouchoir, qu'il portait élégamment en "moucheu d'cou"
J'aimais aussi le voir rentrer avec Julien-Germaine. Passé les jetées, il mettait le cap sur l'épi d'amont et en passant la balise de l'enrochement, il débrayait son moteur pour arriver tranquille, tout doucement, sur son aire, à l'autre épi pour venir accoster la chaloupe Jolie Brise de son frangin, y mettre un petit bout par le travers et s'affairer à ranger la chaloupe.
"La marche arrière,  il y a une, mais j'l'ai jamais passée"...Toute une philosophie.
Maurice était en bon normand un homme discret et taiseux, plein d'humilité. Il est parti comme il a vécu, selon sa volonté, sans fleur ni couronne.
Au nom de tous les équipiers, en mon nom, je présente toutes nos condoléances et sa femme et sa famille.

Dimitri